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Odyssée de la lutte contre le réchauffement climatique : d’Aristote à l’ingénierie spatiale

En 2017, 15364 scientifiques internationaux (l’Union of Concern Scientist) rédigent l’embarrassant et alternatif « The World Scientists Warming to Humanity »(1). Cet Avertissement réaffirme le risque sécuritaire de la dégradation de l’environnement et s’inscrit à la suite de l’échec du rapport Meadows (2).

En décembre 2018, l’astrophysicien H. Dole interviewe son confrère T. X. Thuan (3), qui, « face au réchauffement global qui menace notre planète », invite à participer à une « pétition citoyenne ».

Les prises de parole des spécialistes montent en puissance. Celle de J-P Van Ypersele, Docteur en Physique et ancien Directeur du GIEC (4), à l’appui de résultats satellitaires, est particulièrement remarquée.

Les experts sortent de leur réserve pour pousser un cri d’alarme. Les scientifiques seraient-ils désormais des activistes pour le climat ?

Les réflexions actuelles sur le changement climatique sont en réalité le fruit d’un long cheminement d’observations et de confrontations scientifiques ayant trouvé son aboutissement dans l’ingénierie spatiale. La lutte contre le réchauffement climatique est donc par définition le “fait” des scientifiques. Et aujourd’hui, cette lute se déroule depuis l’espace.

LA PRE-HISTOIRE DE LA SCIENCE DU CLIMAT

Vers 350 av. J.-C., Aristote s’interroge sur les phénomènes atmosphériques dans Les Météorologiques.

Les travaux d’après les grandes découvertes de 1492, financés par les royautés ou la papauté et concernant l’acclimatation de l’homme, permettent l’émergence de la notion d’historicité du climat, bien qu’ils soient une consécration de assèchement des zones humides et du réchauffement de zones glaciales par déforestation et mise en place de nouvelles cultures agricoles et donc sédentarisation et colonisation (textes du Père Biard, de Samuel de Champlain sur La Nouvelle France).

Au XVIIIe siècle, c’est dans le contexte des grandes intempéries qui frappent l’Europe que Buffon s’exprime ainsi : « l’homme a le pouvoir et même le devoir moral de modifier les influences du climat qu’il habite » (Les époques de la nature, 1778).

RIEN NE SE PERD, RIEN NE CRÉE, TOUT SE TRANSFORME

Progressivement, naissent la météorologie puis la climatologie, nouvelles disciplines qui gagnent leurs galons au cours de la longue révolution scientifique qui débute au XVIe siècle et au cours de laquelle les physiciens, astrophysiciens, chimistes, etc., conçoivent la méthode expérimentale comme argument d’autorité, dans une quête de validité universelle tant au niveau de lois physiques que de l’instrumentation.

Pour que naissent ces disciplines, il a fallu connaitre les propriétés de l’air qui entoure la Terre et les dynamiques de notre système solaire. Les travaux des uns ont permis les travaux des autres : Galilée pour la pression de l’air, Torricelli pour le baromètre, Pascal pour l’unité de mesure, Boyle et Mariotte pour les modèles thermodynamiques sur les gaz parfaits, Cavendish et Lavoisier pour l’identification de l’azote et l’oxygène, Bergmann pour la découverte de l’acide carbonique, Schönbein pour les conjectures sur l’ozone, Cornu pour l’observation d’un trou dans le spectre de la lumière du soleil, Heisenberg pour le principe d’incertitude des photons thermiques, les observations des effets albédo ou d’inclination (étymologie du mot climat).

C’est ainsi que la construction de ces sciences a permis l’acceptation des ‘‘50 Essential Climate’’, variables scrutées aujourd’hui par le programme international GCOS (5).

GUERRE SPATIALE CONTRE LE RÉCHAUFFEMENT CLIMATIQUE

De cette odyssée scientifique résulte un vaste échantillonnage spatio-temporel et quantitatif autorisant des modélisations sans cesse plus justes.

Or, quel que soit le sous-système analysé (atmosphère, cryosphère, hydrosphère, biosphère, lithosphère ou tectonique des plaques), la simulation numérique sur les forçages radiatifs relève désormais de l’exactitude aérospatiale.

Dans ce contexte, l’instrumentation astronomique favorise la collecte et la compréhension des données, tant dans l’élaboration de véhicules que d’outils ou techniques d’observation (6).

Ainsi, la géodésie repose sur des mesures centimétriques à la surface de la Terre des vents, marées ou champs de pesanteur via l’ingénierie spatiale utilisant le GPS, la radioastronomie, le télémètre laser satellitaire. C’est pourquoi Robert Kandel, Astrophysicien et Directeur de Recherche à l’Institut Pierre Simon Laplace, met au centre de son travail sur le changement climatique les paramètres satellitaires (projet euro-japonais EarthCARE (Clouds Aerosols Radiation Explorer) (7).

Cette utilisation répond aux recommandations détaillées par le GCOS en matière de résolution locale et temporelle et permet en période de crise de faciliter la gestion des secours ou de concevoir des solutions. Ceci constitue le troisième volet de la politique sur le climat : l’adaptation. Dans les pays qui taxent la pollution atmosphérique et la dégradation environnementale, des sociétés privées constructrices d’engins satellitaires offrent d’ailleurs leurs services aux entreprises souhaitant contrôler leurs émissions de GES (compagnie canadienne GHGSat)(8). L’infographie et l’imagerie radar satellitaire sont alors essentielles.

L’action des astrophysiciens pour la connaissance et la protection du climat est donc plus ancienne, mais aussi peut-être plus opérationnelle, que celle de nombreuses ONG pour le climat, et ceci grâce à l’ingénierie spatiale. La doctrine de cette expertise n’est ni sectaire ni exclusive. Mais elle est bien radicale dans la recherche de précision.


 

Notes :


(1)yasmine_bouzid, par, and yasmine_bouzid. “Une Alerte Lancée Par 15 000 Scientifiques à Propos De La Dégradation De L'environnement.”Veille Cartographique 2.0, 22 Nov. 2017, <veillecarto2-0.fr/2017/11/22/alerte-lancee-15-000-scientifiques-a-propos-de-degradation-de-lenvironnement/>

(2) Rapport Meadows : des chercheurs du Massachusetts Institute of Technology font paraître en 1972 une étude commandée par le Club de Rome sur les dangers d’une société sur-industrialisée et sur-consommatrice.

(3)Dole, Hervé, and CNRS & Univ. “Célébrons La Beauté Et La Profondeur De L'Univers : Une Conversation Inspirante Avec Trinh Xuan Thuan.”The Conversation, 15 Oct. 2019, <theconversation.com/celebrons-la-beaute-et-la-profondeur-de-lunivers-une-conversation-inspirante-avec-trinh-xuan-thuan-109195>

(4) GIEC : Groupe d’Experts Intergouvernemental sur l’évolution du Climat

(5) GCOS : General Comprehensive Operating System ; système mondial d’observation du climat.

(6) Tels ceux utilisés par la Mission GRACE ou encore le Programme DORIS

(8) Legault, Jean-Benoit, et al. “Une Entreprise Montréalaise Cartographie Le Méthane.”La Presse, <2 Feb. 2020, www.lapresse.ca/actualites/environnement/2020-02-02/une-entreprise-montrealaise-cartographie-le-methane>



Bibliographie et articles relatifs au sujet qui peuvent vous intéresser :

- « Institut Pierre Simon Laplace Home Page.» Institut Pierre Simon Laplace. Institut Pierre Simon Laplace, n.d. Web. <https://www.ipsl.fr>

- «Le climat-en-question Home Page.» Le climat en question. Institut Pierre Simon Laplace, n.d. Web. <https://www.climat-en-questions.fr>

- «Laboratoire d’optique atmosphérique Home Page.» Laboratoire d’optique atmosphérique. Unité Mixte de Recherche du CNRS et de l’Université de Lille, n.d. Web. <https://www-loa.univ-lille1.fr>

- «Météo France Climat - météofrance.com» Météo France. Météo France, n.d. Web. <http://www.meteofrance.com/climat>

- «CNES Home Page.» CNES. Centre National d’Etudes Spatiales, n.d. Web. <https://cnes.fr>

- Bock Olivier. GNSS : géodésie, météorologie et climat. Diss. Université Pierre et Marie Curie, 2012. Thèse. WEB. 13 Juillet 2012





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