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Photo du rédacteurLouise DEWAILLY

Direction la Lune, mais pourquoi d'ailleurs ?



Echange plus détaillé avec monsieur Serge Gracieux, responsable du Patrimoine et Expertise spatiale à la Cité de l'espace de Toulouse :


Question : 50 ans après l’exploit du premier homme sur la Lune, quelles sont les nouvelles missions qui emmèneront les hommes à nouveau sur celle-ci ? Par quelles agences spatiales ? Avec quels enjeux ?


Avant de parler de missions, je parlerais de programmes. Il y a deux pistes :

· Celle américaine avec le programme Artémis, seul programme officiel annoncé qui vise à déposer des humains sur la Lune avant (autour de) 2024. Lancé par un président qui souhaite que cet humain soit une femme.

· Et la piste chinoise, où rien n’est précisé mais qui a l’objectif de déposer un chinois sur la Lune autour de 2030. Pas mal de spécialistes imaginent que ce sera une femme.

Il est à noter que le programme américain se renforce du fait de l’existence du programme chinois.


Les américains avaient, il y a une décennie, un programme de retour vers la Lune avec le programme Constellation. De ce programme annulé par le président Obama en 2010, la NASA a pu poursuivre la mise au point du lanceur SLS, Space Launch System, (du type Saturn 5 pour atteindre la Lune avec de grosses masses) et le vaisseau Orion. Le reste est passé à la trappe.

Une philosophie a été mise en place à l’époque de cet arrêt. La desserte du quotidien de la station peut être délégué au privé (Space X, Boeing, etc..) et l’état se réserve l’Exploration – Lune et au-delà – avec donc le lanceur (SLS) et le vaisseau (Orion). Depuis, ce vaisseau Orion s’est développé avec une offre de coopération et l’Europe s’est vu confier le Module de Service, ce qui est une grande première.

Ce reste de programme s’est intégré dans la nouvelle feuille de route du projet de Lunar Orbital Platform-Gateway (LOP) dont les premiers modules devraient s’envoler dès le premier vol habité d’Orion. Depuis cette station lunaire, un module lunaire ira se poser pour quelques jours avec 4 personnes mais nous n’avons pas encore de forme précise pour ce module. Suivant les délais dont disposeront les industriels, les formes déjà étudiées ou du matériel existant seront réutilisés. (L’annonce du constructeur doit être faire ce 30 avril 2020 !)

Là l’objectif est mixte : politique et technologique.

Je crois que les politiciens américains se sont donnés comme objectifs d’être les premiers de retour sur la Lune avant les chinois.


Les chinois sont sur une autre démarche. Celle de leur programme spatial en général : ’Apprendre des autres, utiliser et améliorer ce que les autres ont déjà fait, faire mieux et surtout montrer à son peuple qu’ils sont les meilleurs’’.

Cette fin année verra le retour automatique de 2 kg de roches lunaires et dans 1 à 2 ans, la même chose de la face cachée (une première mondiale).

En orbite lunaire, ils développent une station type Tiangong (de petite taille) et le nouveau vaisseau qui n’a pas encore de nom connu mais qui est actuellement en cours de test (premier prévu le 5 mai avec le nouveau lanceur CZ5). Comme Orion, il sera destiné à l’exploration mais aussi à l’orbite basse terrestre pour desservir la future grande station modulaire. Seule la taille du module de service et la propulsion change suivant le modèle.

Les chinois préparent en secret le débarquement lunaire. Il y a deux pistes :

· Un module lunaire de taille du type d’Apollo.

· Mais il existerait une seconde piste, plus ambitieuse, serait une sorte de gros rover pressurisé déposé seul au préalable et un petit véhicule léger non pressurisé où 2 taïkonautes descendraient de l’orbite lunaire pour se poser à côté du gros rover, le rejoindre à pied et y passer quelques jours avant de remonter avec le petit véhicule.

l’objectif serait également politique et pour le prestige, à l’image de ce qu’a été Apollo : montrer qu’ils sont les meilleurs.


Deux agences sont donc sur les rangs. Pas de course officielle mais…

Les russes ont des idées, des projets mais pas de roubles. Les européens espèrent un strapontin dans le vaisseau Orion mais pas de sitôt sur la Lune.


Question : L’exploration lunaire pourrait-elle passer en arrière-plan comparée à celle de Mars ? La Lune nous a-t-elle déjà dévoilé tous ses secrets ?


Ma vision personnelle est que la Lune est incontournable pour apprendre à aller ailleurs. À ce jour, on ne sait pas aller vers Mars et revenir (en vols habités). On sait le faire, mais les passagers seraient dans un tel état que personne ne les enverra. On doit tout apprendre et la station LOP deviendra utile pour cela car elle ne sera pas protégée du champ magnétique de la Terre comme l’est ISS.


Aller sur la Lune, ce sera pour la politique et la galerie au début mais ensuite se sera utile pour tester tout ce dont on aura besoin pour survivre en milieu hostile (ce que l’on ne sait pas encore bien faire) et toute cette technologie permettra de tester ce qui nous sera utile pour Mars.

Ensuite, tout ce qui sera installé sur la Lune servira de base, de lieu de passage possible pour exploiter éventuellement quelques ressources, mais surtout pour tester du matériel, le fiabiliser avant de partir l’utiliser sur Mars. C’est en cela que l’on peut dire que la Lune est une étape vers Mars. Pas physiquement sur le parcours, mais comme lieu de test.


Les secrets de la Lune ! Non, et on a beaucoup à apprendre de la Lune, notamment via les roches anciennes de la face cachée. Comme pour Apollo, la science va profiter de cette agitation des vols pilotés et sera présente pour en savoir plus. Mais ce sont les vols automatiques qui apporteront le plus d’informations scientifiques sur la Lune (comme pour Mars d’ailleurs).


Question : Les missions visant Mars ont-elles le même enjeu que la conquête lunaire de 1969 (à savoir l’enjeu politique en période de Guerre Froide) ? Ou y a-t-il un réel enjeu scientifique ? Si oui, lequel, quels sont les objectifs ?


Au risque de vous décevoir, le vol habité vers Mars n’est pas ‘’utile’’. Il rentre dans la démarche humaine de découverte et c’est pour cela qu’il est indispensable ! On le fera. Le premier vol vers Mars sera probablement un survol, à l’image de ce qu’aurait été les missions ZOND des soviétiques, un flight by permettant de voir si l’on peut vivre 18 mois à bord d’une grosse boite. Ce fut d’ailleurs la principale raison du vol du Dr. Poliakov dans Mir en 1994/95.

Le pays qui le réalisera [le vol vers Mars] bénéficiera d’une belle aura médiatique même si je mettrais un bémol en termes de ‘’Direct’’ (8 à 20 min de délai). C’est pour cette raison qu’il s’agira d’une mission politique.


La solution passe par le retour vers la Lune qui doit impérativement devenir international. Et ainsi, le voyage vers Mars sera international pour des raisons budgétaires. Cependant les chinois, évincés de la station ISS par les américains, pourraient peut-être avoir assez de devises pour se lancer tout seul vers Mars.

La science, ce sont les robots qui la font. En juillet 2020, Perseverance doit décoller. Et sur Mars, ce rover doit recueillir les premiers échantillons qui seront mis dans des conteneurs qu’un prochain rover ramassera pour les placer dans un véhicule qui les ramènera sur Terre autour de 2030.


Si l’homme intervient plus tard dans ce circuit, c’est pour venir ‘’voir et analyser’’ une zone qui aura été détectée par des orbiteurs, observée par des drones et reniflée par des rover. Là, les capacités humaines (qui sont 1000 fois plus couteuses) seront mises à profit pour sélectionner les bons échantillons permettant de mieux finaliser la compréhension de l’histoire de Mars.

Nous en savons toujours plus sur Mars, mais il y a encore des manques.


Bibliographie et articles relatifs au sujet qui peuvent vous intéresser :



HADJAZI, Habib. “Combinaisons, Fusée, Salaires… Combien a Coûté La Mission Apollo 11 ?” Leparisien.Fr, 21 July 2019, www.leparisien.fr/societe/combinaisons-fusee-salaires-combien-a-coute-la-mission-apollo-11-21-07-2019-8120976.php.


GRANDBESANÇON, Laure. “Mission Apollo 11 : L’histoire Du Premier Homme à Avoir Marché Sur La Lune.” www.Franceinter.fr, 25 June 2019, www.franceinter.fr/emissions/les-odyssees/mission-apollo-11-l-histoire-du-premier-homme-a-avoir-marche-sur-la-lune.


La rédaction de Futura. “Apollo 11 : On a Marché Sur La Lune !” Futura, 21 July 2019, www.futura-sciences.com/sciences/actualites/aeronautique-apollo-11-on-marche-lune-19971/.


MICHEL Valentin. “50 Ans de La Mission Apollo 11 : Objectif Lune à La Télévision.” Leparisien.Fr, 8 July 2019, www.leparisien.fr/culture-loisirs/tv/50-ans-de-la-mission-apollo-11-objectif-lune-a-la-television-08-07-2019-8111925.php.



MOLGA, Paul. “Apollo 11, Un Petit Pas Pour l’homme, Un Triomphe Pour l’Amérique.” Les Echos, 16 July 2019, www.lesechos.fr/idees-debats/sciences-prospective/apollo-11-un-petit-pas-pour-lhomme-un-triomphe-pour-lamerique-1038262.


Sciences et Avenir avec AFP. “Le Monde a Suivi En Direct La Mission Apollo 11 Vers La Lune.” Sciences et Avenir, 17 June 2019, www.sciencesetavenir.fr/espace/systeme-solaire/le-monde-a-suivi-en-direct-la-mission-apollo-11-vers-la-lune_134523.

Musique proposée par La Musique Libre :

Isolated - Perfection : https://youtu.be/QK7Hcus2jC0


Crédit photo : Louise DEWAILLY

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